AB et biodiversité
Agriculture et Biodiversité, un lien étroit
De façon pratique, les liens entre activité agricole et biodiversité se comprennent à l’échelle de la parcelle, de l’exploitation, et du territoire.
Les systèmes d’exploitation agricole et leurs effets sur la biodiversité
La France rurale est, à l’échelle du siècle écoulé, dans une phase de recru biologique : elle est moins peuplée et moins utilisée. En 150 ans, un dixième du territoire est passé de la culture et de la prairie à la forêt. Cependant, des dynamiques historiques de spécialisation territoriale, d’intensification, de déprise agricole, et de mitage périurbain obligent à un constat nuancé, selon les situations.
Les cultures couvrent 30% du territoire et leur intensification historique, répondant à un impératif d’autosuffisance alimentaire et de développement économique, a entraîné des effets défavorables à la biodiversité sur ces terres.
Dans les régions de grande culture, représentant la moitié des surfaces cultivées, les prairies et les surfaces boisées occupent une surface réduite, ce qui induit une homogénéité des habitats et des sources alimentaires, préjudiciable en particulier à la faune sauvage. L’usage régulier des pesticides, accru par une pression croissante des ravageurs suite à l’intensification de l’agriculture, est par ailleurs une source importante de réduction de la diversité de la flore et la faune dans les champs cultivés (y compris dans les sols) et dans leur voisinage. L’usage important d’engrais chimiques et d’effluents d’élevage ont également réduit la diversité biologique des milieux en les eutrophisant. Les productions intensives spécialisées, telles que le maraîchage, l’arboriculture, et la viticulture ont eu les mêmes effets.
L’élevage concerne également 30% du territoire (surface en herbe, cultures fourragères, parcours). Si cette activité –quand elle n’est pas conduite hors-sol est globalement favorable au maintien de la biodiversité des écosystèmes prairiaux, dans certaines régions, la spécialisation excessive et l’intensification ont eu des effets néfastes sur l’environnement, notamment par eutrophisation des milieux et par extension des cultures fourragères annuelles.
Les zones de polyculture élevage ont évolué par spécialisation/intensification ou par déprise, deux dynamiques défavorables à la diversité biologique. Ainsi, l’intensification laitière et les cultures fourragères annuelles qu’elles exigent ont souvent été un facteur d’érosion de la diversité biologique des terroirs herbagers. Enfin, la concentration régionale des élevages hors-sols soulève des problèmes importants de pollution par les nitrates et les phosphates. […]
L’agriculture et les activités rurales constituent un enjeu primordial pour la gestion durable de la biodiversité en France.
Elles contribuent à la gestion de milieux vivants, semi-naturels ou naturels qui hébergent, sur près des deux tiers du territoire, l’essentiel du patrimoine vivant national. Par ailleurs, les milieux présentant une diversité biologique importante sont favorables à une agriculture plus économe, moins dépendante des ressources non renouvelables et moins polluante, de même qu’une agriculture généralement respectueuse de l’environnement est favorable à la biodiversité.
Si les réformes successives de la PAC ont permis d’intégrer la prise en compte de ce patrimoine, les effets des politiques de soutien à l’agriculture sur la diversité biologique des milieux ruraux restent globalement défavorables. Ces effets sont à lier au déséquilibre entre les mesures soutenant, directement ou indirectement, des systèmes de production intensifs et la spécialisation régionale, et les mesures agro-environnementales et rurales, marginales en termes de moyens et de surfaces, et dont les effets locaux et globaux sur la biodiversité restent très largement insuffisants.
Cet extrait d’un article de synthèse de Gilles KLEITZ , responsable Stratégie nationale pour la biodiversité au Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable, date de 2005.
Agriculture Biologique : un impact réel sur la biodiversité
Quelques pratiques de la bio en faveur de la biodiversité:
- pas de produits phytosanitaires
- pas de fertilisation chimique
- des rotations longues et diversifiées
- des cultures associées
- un nombre d'animaux par parcelle réduit
- l'utilisation d'insectes et organismes auxiliaires de culture d'où la necessité de préserver ou d'implanter des haies et autres réservoirs de biodiversité
- l'utilisation d'espèces adaptées au milieu (biodiversité cultivée)
L’Inra a publié les résultats d’une expertise scientifique collective sur les relations entre l’agriculture et la biodiversité.
Cette expertise, commandée par les ministères en charge de l’agriculture et de l’écologie, s’inscrit dans un enjeu mondial – stopper l’érosion de la biodiversité – et dans des échéances de politiques agricoles et environnementales nationales et européennes. L’expertise dresse le bilan des connaissances disponibles concernant les impacts de l’agriculture sur la biodiversité et les services que peut rendre la biodiversité dans les processus de la production agricole. Elle explore les pistes pour mieux intégrer la biodiversité dans les pratiques agricoles et fait le point sur les outils de l’action publique.
L’agriculture biologique est bénéfique à la biodiversité, laquelle rend à son tour des « services » aux agriculteurs, affirme l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) dans ce rapport qui rompt avec 50 ans de priorité accordée à l’amélioration des rendements.
Dans un paysage encore suffisamment diversifié, l’adoption d’un mode de production moins intensif permet de multiplier insectes pollinisateurs et ennemis naturels des ravageurs, et de compenser relativement bien les pertes de productivité liées à la suppression des engrais chimiques. Les chercheurs ont constaté que pour que cette compensation fonctionne bien, le pourcentage d’éléments naturels dans le paysage devait être supérieur à 30%.
La biodiversité est désormais définie par la loi comme une valeur à protéger, mais « le droit a du mal à se l’approprier, et elle ne pèse pas lourd par rapport à la propriété privée (foncière, et aussi intellectuelle pour les OGM) ou à la liberté des échanges », relève la juriste Isabelle Doussan.
Documents à télécharger
- L’étude complète est téléchargeable sur le site de l’INRA
- Expo GAB85 Agriculture et Biodiversité, résumé étude INRA 2008
- lien vers une émission de France Inter du 15 aout 2011 sur le role de l'agriculture bio dans la préservation de la biodiversité
La biodiversité, ça se cultive aussi !
Dans le cadre de l’année internationale de la Biodiversité, le Réseau Semences Paysannes rappelle qu’il ne faut pas oublier la biodiversité cultivée !
« N’enterrons pas la biodiversité dans des frigos. Ne la laissons pas aux mains des multinationales. Pour la faire vivre et l’enrichir, semons-la et défendons les droits des paysans qui la cultivent, des jardiniers qui la récoltent et des peuples qui en vivent. »
La biodiversité, ce sont des milliers d’espèces animales et végétales sauvages, quelquefois en voie de disparition et qu’il est urgent de préserver. Mais, la biodiversité ce n’est pas que des fleurs rares ou des animaux exotiques. C’est aussi notre patrimoine cultivé : légumes, céréales, fruits, fleurs qui poussent dans nos champs et nos jardins. Ce patrimoine, créé et entretenu par des générations de paysans et de jardiniers, est depuis une centaine d’années appauvri par des pratiques agricoles, commerciales et juridiques qui tendent à réduire la diversité de ce que l’on sème à quelques variétés, de plus en plus industrielles.
Aujourd’hui, la biodiversité, sauvage comme agricole, est menacée par les droits de propriété intellectuelle qui permettent à des multinationales de se l’approprier. Si quelques firmes parviennent à posséder la biodiversité, les paysans ne pourront plus la cultiver. Le Réseau Semences Paysannes affirme les droits des paysans de ressemer, d’échanger et de vendre leurs semences, de protéger leurs savoirs de la biopiraterie, de participer aux décisions sur la biodiversité.
Ces droits sont inscrits depuis 2004 dans un traité international* signé par la France, mais ne sont toujours pas mis en application dans les lois françaises.
Le Réseau Semences Paysannes s’est donné pour but de faire connaître et de défendre la diversité des variétés paysannes comme des pratiques qui les accompagnent. Pour lui, la biodiversité cultivée ne doit pas rester confinée dans des réserves naturelles ou des conservatoires fermés, elle doit d’abord vivre et évoluer dans les champs et les jardins. Réseau d’associations de paysans, de paysans-boulangers, de jardiniers, de collectionneurs, d’artisans semenciers, tous passionnés, il participe depuis 2003 à la collecte et l’échange de graines et de plants de légumes, de fruits et de céréales oubliés ; il agit pour la transmission des savoirs et savoir-faire qui accompagnent cette diversité végétale et il défend les droits des paysans de cultiver la biodiversité.
Documents à télécharger
- Réseau Semences Paysannes : La biodiversité, ça se cultive aussi !